Alors qu’en France, concilier études et pratique sportive de haut niveau se révèle souvent compliqué, avoir un bon niveau sportif est un vrai atout pour intégrer une université américaine.
Samedi 14 décembre, une trentaine de jeunes âgés de 17 à 22 ans se sont retrouvés sur les terrains du TACFCO, le club de football du Touquet, pour une journée un peu particulière. Au programme, des matchs toute la journée sous l’œil attentif de quelques adultes. Rien d’anormal jusque là. Sauf que contrairement à la plupart des jeunes de cet âge, ces joueurs n’espèrent pas partir au FC Barcelone, au Real Madrid, à Arsenal ou au Bayern de Munich mais… aux États-Unis.
Le pays de l’oncle Sam ne fait pas partie du petit cercle des grandes nations du football, mais ses universités comptent parmi les plus attractives au mondeet permettent de pratiquer le sport à haut niveau tout en continuant ses études, ce qui est le plus souvent impossible en France. Surtout, les établissements offrent des places et des bourses d’études généreuses aux sportifs dotés d’un certain potentiel. La première journée de détection organisée par l’entreprise française Uni Elite Athletes visait à repérer, pour le compte des universités américaines, les jeunes footballeurs français pouvant prétendre à ce sésame. «L’année dernière, nous avons réussi à décrocher près de 70 bourses universitaires pour des jeunes aux États-Unis, mais nous ne pouvions évaluer leur niveau que grâce à des vidéos», explique Edouard Lacroix, cofondateur de l’agence.
Pour pouvoir tenter sa chance, il faut avoir le bac ou être sur le point de le décrocher tandis qu’un bon niveau d’anglais est nécessaire. Côté football, le niveau DH (6ème division française) est un minimum requis. Thibault Charmey, 22 ans, a atterri aux États-Unis en août 2012 grâce à ce système. Formé à Boulogne-Billancout, il tente sa chance en troisième division italienne à 18 ans, où on lui avait fait miroiter un contrat. Malheureusement, l’aventure tourne court. Il rentre donc en France, et entame des études de journalisme à l’IEJ, tout en continuant le football à Anthony, en DH. «Mais entre les cours, le travail à faire à la maison, les stages en entreprise, les entraînements, et les déplacements, j’avais du mal à m’en sortir», raconte-t-il. Sans compter qu’en France, ses chances de passer professionnel étaient devenues inexistantes. Il rentre alors en contact avec Uni Elite Athletes, qui après examen de son dossier parvient à lui obtenir plusieurs propositions.
Les Américains peinant à former de très bons footballeurs, les universités n’hésitent pas à offrir des bourses à des talents étrangers pour élever le niveau de leur équipe. Les établissements concernés ne sont cependant pas les plus cotés: pas question de Harvard, Stanford ou de MIT ,ici. «Il faut souvent se décider entre de bonnes universités qui ont une équipe moyenne et une bonne équipe dans une université moyenne», résume Thibault, qui a opté pour un cursus journalisme et management sportif à l’université «moyenne» de West Alabama. Les étudiants dans son cas cherchent de toute façon le plus souvent à poursuivre encore un peu leur rêve sportif, le diplôme préparé ne représentant guère plus qu’un parachute en cas d’échec.
DES CURSUS ENTIÈREMENT AMÉNAGÉS
Sur place, Thibault profite d’un cursus entièrement aménagé. «Le matin, nous avons cours. En début d’après-midi, une salle d’étude obligatoire est organisée pour tous les joueurs de l’équipe, afin que nous faisions le travail exigé par les professeurs. Des enseignants peuvent venir nous aider si nécessaire. Le reste de l’après-midi et les soirées sont consacrés aux entraînements et aux déplacements». La première année, sa bourse lui laissait 1500 dollars à payer, plus le loyer de son appartement. Après une première saison très réussie, l’université a décidé de prendre en charge l’intégralité de ses frais de scolarité. Thibault doit donc uniquement se charger de son loyer.
«En général, précise Edouard Lacroix, les bourses couvrent entre 80 à 90% des frais universitaires. Selon les tarifs pratiqués par les établissements, le reste à payer se situe donc généralement entre 1000 et 6000 dollars par an », Uni Elite Athletes prélevant 5% du montant de la bourse la première année pour se rémunérer. Malgré les bourses, s’expatrier par ce biais reste donc coûteux. Mais pour les jeunes qui font ce choix, un rêve: se faire «drafter» (choisir) par une équipe de MLS, le championnat professionnel américain. Dans la société d’Edouard Lacroix, qui a envoyé des jeunes pour la première fois aux États-Unis en 2011, deux footballeurs viennent d’atteindre ce graal. Thibault, lui, continue d’espérer. «L’été dernier, j’ai été élu dans l’équipe type national de la NPSL, un championnat semi-pro disputé par mon équipe universitaire». Il espère pouvoir participer à la draft «d’ici un an». Et si il n’est pas retenu? «Et bien, au moins, j’aurais obtenu un diplôme reconnu».